Que de discours indigents de nos jours sur la foi ! Et à quel point le mot croire s’est-il galvaudé ? Telles que posées en liminaire de l’ouvrage, ce sont ces questions qui ont alimenté la méditation du jeune et non moins brillant dominicain, Camille de Belloy.
Méditation plutôt que réflexion, serait-on tenté de préciser, tant ce recueil semble porté autant par l’intelligence que par la prière. Enseignant à l’Université catholique de Lyon et prédicateur au « Jour du Seigneur », l’auteur a, en effet, un art consommé de mettre à la portée du plus grand nombre des concepts théologiques. Surtout quand ceux-ci émanent en majeure partie des pensées de Thomas d’Aquin.
Non pas que l’école du thomisme soit trop hermétique, mais nécessite néanmoins une certaine base de connaissances philosophico-théologiques pour la rendre accessible. C’est là tout l’art de Camille de Belloy.
Soucieux « d’ouvrir tel un trésor », la réflexion théologique par ses maîtres de la période dite scolastique, celui-ci va ainsi explorer, dans la tradition et de façon originale, les chemins toujours actuels de la foi chrétienne en mettant en exergue la solennité de la Parole et la foi qui en découle.
Comme cela est admirablement résumé dans le verset du psaume 115 : « J’ai cru et je parlerai » que reprendra l’apôtre Paul dans 2 Corinthiens 4,13 : « J’ai cru, c’est pourquoi j’ai parlé ».
« Des mots du langage humain, qui ne doivent pas être une adhésion muette ou passive à cette vérité » s’empresse de souligner le père dominicain. L’unique façon croyante de recevoir ces propositions est de les affirmer à notre tour. « C’est laisser la Parole de Dieu être à l’œuvre en nous les croyants », tel que le suggère le même Paul aux Thessaloniciens (1 Th 2,13).
Comment ?
Cela peut se faire à tout moment spécifie l’auteur. En simple pensée, dans la prière personnelle ou communautaire, dans la célébration de l’eucharistie, dans l’étude ou la proclamation publique. Autant d’actes de foi ouvrant au « Verbe qui s’est fait chair » transmis dans le prologue de Jean qui engagent chaque homme dans la réalité insondable de l’Incarnation.
Alors, je ne me fais pas seulement une conception, une idée de l’incarnation comme n’importe qui pourrait se représenter de l’extérieur un système de pensée. Je dis un simple Oui, un Amen, j’adhère à une réalité qui déborde infiniment les capacités de mon esprit, mais qui en même temps l’ouvre, l’élargit, l’élève, l’accorde à la Vérité même de Dieu : je crois !
Admirable méditation que cette page 24 du chapitre intitulé « Vérité », celle qui rend véritablement libre. Et la séquence suivante, prénommée « Témoignage » est toute aussi inspirante.
Comme souligné dans les Actes des Apôtres, ces derniers ne sont pas témoins d’un fait, ils sont témoins d’une personne, le Christ. Pour croire au Fils de Dieu, il faut croire à leur témoignage, un témoignage très concret, sensoriel de la part de ceux qui ont vu, qui savent et à qui l’on reconnaît autorité et crédibilité. C’est patent en ce qui relève de l’affirmation des disciples, mais n’en va-t-il pas de même dans la vie humaine la plus ordinaire où parents et catéchistes en qui nous avons confiance nous transmettent un vécu spirituel qui constituera le creuset de notre foi ?
Un viatique tout entier contenu dans les versets de la première épître de Jean 1, 1-3. « Ce qui était dès le commencement, ce que nous avons entendu, ce que nous avons contemplé, ce que nos mains ont touché du Verbe de vie, nous vous l’annonçons afin que vous aussi, vous soyez en communion avec nous. «
Une foi indissociablement liée à une affaire de parole que le livre va étayer en trois autres chapitres, (« Une petite goutte », « Une lampe pour mes pas », « Aimer en croyant ») qui chacun à leur manière, vont célébrer les noces de la foi et de l’amour s’appelant et se répondant sans fin pour faire de notre vie en Christ, une vie du Christ en nous.
De sorte qu’avec ce secret de la foi agissante en nous ainsi dévoilé, l’opus de Camille de Belloy enrichi de références à l’Écriture comme à celles de Thomas d’Aquin éclaire judicieusement le mystère du verbe « croire ».
Michel BOLASELL
articles@marenostrum.pm
Belloy, Camille de, « Je crois et je parlerai », Le Cerf, 16/09/2021, 1 vol. (115 p.), 14,00€
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