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Benoît XVI, Écrits fondamentaux : le testament théologique et spirituel, Le Cerf, 04/01/2023, 1 vol. (261 p.), 20€.

Éditeur de Joseph Ratzinger lorsqu’il était cardinal, puis de l’ensemble de ses œuvres durant son pontificat, le Cerf avait toute légitimité à publier sous le titre d’Écrits fondamentaux les meilleures réflexions du défunt pape Benoît XVI.
Reconnu comme l’un des plus brillants théologiens contemporains, et sans doute des siècles précédents, ce Bavarois coche en effet toutes les cases du grand intellectuel et d’homme d’Église.
Enseignant, philosophe, connaisseur des langues anciennes et modernes comme des diverses littératures, cet érudit est à classer parmi les intellectuels de haut rang crédité d’une œuvre immense, riche de seize tomes.
C’est parmi cet amoncellement d’écrits, que les éditions du Cerf ont puisé quatre-vingt-deux extraits, soigneusement sélectionnés, pour offrir au lecteur la quintessence d’une pensée aussi foisonnante qu’enrichissante.
La grande majorité de ces textes ont été écrits une fois l’auteur devenu pape, et, parmi eux, la moitié environ sont des morceaux choisis d’audiences générales du mercredi, notamment durant les derniers temps de son pontificat.
Pour en faciliter la lecture, l’éditeur a scindé l’ensemble en plusieurs chapitres, huit en tout, en une judicieuse progression : la Foi – Dieu – Jésus-Christ – l’Église – la Liturgie – le Monde et les Fins dernières.
Le premier d’entre eux, la foi, divisé en plusieurs sous-chapitres, est amplement détaillé. Après s’être attardé sur la définition du mot croire, puis sur le désir de Dieu « inscrit dans le cœur de tout homme », c’est en philosophe que le pape émérite analyse le concept de foi et de raison, en citant Saint Anselme pour expliquer « que la recherche de l’intelligence est un acte antérieur à celui de croire. »

La raison d’être de la théologie

Un enseignement clair et pédagogique que l’auteur poursuivra en abordant ensuite les diverses étapes de la foi catholique, et la grande joie que constitue l’annonce de la Bonne Nouvelle, comme il le soulignait dans Le Sel de la terre :
« Réjouissez-vous ! Dieu est là, vous êtes aimés, et c’est établi pour toujours. »
C’est également à l’occasion d’une audience générale du mercredi, sorte de catéchèse accessible au plus grand nombre, que se succèdent les différents chapitres dans l’ordre chronologique.
Dieu, d’abord. Et comment en parler aujourd’hui ?

Parler de Dieu, c’est avoir bien clair ce que nous devons apporter aux hommes et aux femmes de notre temps ; non pas un Dieu abstrait, une hypothèse, mais un Dieu concret qui existe et est rentré dans l’histoire. Un Dieu comme réponse à la question fondamentale du pourquoi et du comment vivre.

Expliquait-il en novembre 2012, puis avant d’expliciter de façon plus fouillée le Dieu Trinité tel qu’il l’avait commenté dans « La foi chrétienne hier et aujourd’hui », l’ex-professeur souligne la raison d’être de la théologie.

Obéissant à l’impulsion de la Vérité qui tend à se communiquer, la théologie naît aussi de l’amour et de son dynamisme… De cette double origine de la théologie, qui s’inscrit dans la vie interne du Peuple de Dieu et dans sa vocation missionnaire, découle la manière dont elle doit être élaborée pour satisfaire aux exigences de sa propre nature.

Tirée de l’instruction Donum Veritatis, la pensée est ici plus consistante mais sait se faire assimilable lorsque Benoît XVI parlait de Jésus lors d’une autre audience hebdomadaire.

Le Sens, fondement de tout être, est devenu chair, c’est-à-dire il est entré dans l’histoire, il fait partie d’elle… Dès lors, il ne serait plus simplement donné dans le monde des idées, il serait à trouver au milieu du temps dans le visage d’un homme.

La joie, élément fondamental du christianisme

Après avoir évoqué successivement l’humble attitude d’écoute de Marie, la grâce de l’incarnation et la médiation de Dieu en la personne de Jésus-Christ, le lecteur découvre un long chapitre sur l’Église, divisé en plusieurs thèmes : la communauté ; le ministère et l’évangélisation au cours desquels le pape exprimait la profondeur de sa méditation.
Ainsi pour l’Église :

Cette dernière qui est entièrement de l’Esprit, mais qui possède une structure, la succession apostolique, dont la responsabilité est de garantir le fait que l’Église demeure dans la vérité donnée par le Christ, de laquelle vient également la capacité d’aimer.

De même pour l’élément fondamental du christianisme que constitue la joie.

Non pas la joie au sens d’un amusement vulgaire, qui peut avoir lieu sur un arrière-plan de désespoir. Nous savons bien que le divertissement est souvent le masque du désespoir. Mais d’une joie véritable. Une joie qui subsiste même si l’existence est difficile, et qui rend alors vivante cette existence.

Parce qu’il développe à la fois la manière comme le sens de la célébration, le chapitre sur la liturgie est tout aussi attrayant. En premier lieu, par le lien intrinsèque qui l’unit à la beauté. « Car la beauté n’est pas un facteur décoratif de l’action liturgique ; elle en est plutôt un élément constitutif, en tant qu’elle est un attribut de Dieu lui-même et de sa révélation », explique-t-il dans l’exhortation apostolique Sacramentum Caritatis.
Et il en va pareillement de la célébration eucharistique et de la liturgie de la parole où Dieu nous parle dans notre vie actuelle. Ainsi affirme-t-il dans une autre exhortation apostolique Verbum Domini.

Le Christ, réellement présent dans les espèces du pain et du vin, est présent analogiquement dans la Parole proclamée dans la liturgie. Approfondir le sens de la sacramentalité de la Parole de Dieu, peut donc favoriser une compréhension plus unifiée du mystère de la révélation qui profitera à la vie spirituelle des fidèles et à l’action pastorale de l’Église.

Une somme accessible au plus grand nombre

Catéchiste, théologien et prédicateur, ce pédagogue planétaire n’en occulte pas moins les réalités universelles actuelles. Ainsi, le large chapitre intitulé « Le Monde » par l’éditeur, témoigne-t-il de diverses ouvertures. Pêle-mêle, le pape émérite évoque-t-il l’économie et la morale, le volet social et solidaire ainsi que la notion d’Église et d’État, en s’attardant longuement sur l’importance du dialogue. Dialogue œcuménique pour accroître la fraternité chrétienne et interconfessionnelle tout auprès du peuple juif que de l’Islam.
« De sorte qu’en tenant compte de la problématique importante de la distinction entre l’ordre sociopolitique et religieux, les religions puissent apporter leur contribution au bien commun », souligne-t-il.
Commentaire éclairant du mystère du salut divin sur l’humanité actuelle, ce recueil d’Écrits Fondamentaux s’avère ainsi à la fois comme une précieuse catéchèse et un indispensable viatique. Une somme accessible au plus grand nombre qui prend toute sa dimension dans les chapitres consacrés aux fins dernières « De Ultima Finis » relatives à la perception du jugement divin. 

Devant le regard du Christ s’évanouit toute fausseté. C’est la rencontre avec Lui qui, en nous brûlant, nous transforme et nous libère pour nous faire devenir vraiment nous-mêmes. Les choses édifiées durant la vie peuvent alors se révéler paille sèche, vantardise vide et s’écrouler. Mais dans la souffrance de cette rencontre, où l’impur et le malsain de notre être nous apparaissent évidents, se trouve le salut.

Une belle leçon d’espérance à l’image de l’ensemble de ces divers Écrits.

Image de Chroniqueur : Michel Bolassell

Chroniqueur : Michel Bolassell

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