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Olivier Poivre d’Arvor, Deux étés par an, Stock, 24/01/2024, 1 vol. (285 p.), 20,90€

C’est un récit qui imprègne et qui marque. Un livre qui bouscule sans rebuter sur un sujet que nous laissons dans un coin de cerveau pour ne pas y penser, celui du changement climatique, de la fonte des glaciers, de la montée des océans, et de la recherche désespérée de nouvelles sources d’énergie. Nous sommes en 2048 et 29 pays doivent voter ou non le renouvellement du Traité de l’Antarctique qui interdit toute exploration à des fins privées ou de souveraineté nationale. Les textes sont clairs, les parties « s’engagent à assurer la protection globale de l’environnement en Antarctique et des écosystèmes dépendants et associés et de désigner l’Antarctique comme réserve naturelle, consacrée à la paix et à la science » confirme le Protocole de Madrid signé en 1991. 29 pays pour voter ? Non, pas complètement, car l’auteur émet l’hypothèse que des oiseaux migrateurs puissent voter – des sternes arctiques, Jet et Lily, nos deux héros –, une baleine, un cachalot, un vautour, des perroquets et quelques autres animaux incarnés d’une manière adroite comme des personnages à part entière. Le roman est d’ailleurs dédié à nos meilleurs amis : « Les quatre cents milliards d’oiseaux ».

Le texte d’Olivier Poivre d’Arvor tient tant au registre de la poésie que du conte, loin de la pensée magique du renoncement, mais encore de la féerie du possible car nous prenons de l’altitude avec lui – le narrateur devenant le premier Homme-Oiseau des temps modernes. L’auteur n’est pas n’importe qui, il connaît bien son sujet, Olivier Poivre d’Arvor est depuis plusieurs années Ambassadeur pour les pôles et les enjeux maritimes avec pour mission de rassembler les énergies pour non seulement alerter mais encore proposer les solutions de demain. La seconde grande conférence sur les océans qui se tiendra à Nice en juin 2025 sous l’égide des Nations Unies en étant la prochaine étape importante.

L’auteur avait clairement le choix entre un essai et une vision romanesque pour traiter ce sujet ; il a bien eu raison d’aller vers les Lettres et nous proposer de prendre de l’altitude, rien de mieux pour marquer les esprits et inscrire cette évolution du climat dans nos imaginaires, préalable à toute révolution nécessaire. Les sternes de l’arctique lui en sont reconnaissantes après le voyage éprouvant qu’il lui font faire d’un pôle à l’autre en passant par Alexandrie, le Tibet ou l’Amazonie. La Grande fonte commence en 2024, en 2035 la route maritime du Nord est ouverte au trafic maritime avec l’aide de méthaniers surpuissants, en 2048, année qui nous intéresse, la Russie est devenue vassale de la Chine, l’Union européenne ne donne plus de visas pour les extra-communautaires, le sud de l’Europe vit dans un incendie permanent, l’Himalaya se visite en hélicoptère, l’Ecosse et le Groenland deviennent des lieux de migrations et d’exils où l’on cultive la salicorne, nouvel or vert pour produire de l’huile, donc de l’énergie, la glace, enfin, est vendue en contrebande à prix d’or.

Nous apprécions cette approche qui mélange la fiction dans un cadre scientifique bien documenté. Rien n’est laissé au hasard. L’Homme-Oiseau qui est ce vieil ambassadeur à la retraite continue de porter la bonne parole depuis ses nuages et ses habitudes de baroudeur où les mots portent l’idée qu’il est encore possible de changer les choses.

Image de Chroniqueur : Sébastien de Courtois

Chroniqueur : Sébastien de Courtois

sdecourtois@gmail.com

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