Florence Quentin, L’Égypte ancienne : vérités et légendes, Perrin, 22/09/2022, 13€.
Florence Quentin, Comprendre les symboles et les divinités de l’Égypte ancienne : dictionnaire illustré, Hozhoni, 13/10/2022, 18€.
Mes tout premiers pas en Égypte m’en avaient donné la prescience mais c’est bien ici même que s’est manifestée pour moi la rencontre avec le "tout autre", sous l’apparence du cosmos égyptien. Même si j’adhère pleinement à l’idée d’un Angelus Silesius – "Arrête, où cours-tu donc, le ciel est en toi : et chercher Dieu ailleurs, c’est le manquer toujours" –, depuis ce jour il me semble à nouveau entendre le murmure des dieux et des déesses des "Deux Terres".
Florence Quentin, « Vivante Égypte de Gizeh à Philae » - Prix 2016 Écritures & Spiritualités
C’est ainsi qu’en 2016, dans Vivante Égypte, Florence Quentin, égyptologue, nous révèle le secret de sa vocation. Elle a douze ans et elle fait son premier voyage sur cette Terre des pharaons et qui deviendra, pour toujours, son « Orient ». Un Orient éternel… Le voyage est souvent le moyen employé par cette admirable organisation qu’on appelle le hasard, pour nous apporter la Lumière. Florence entame alors un double chemin initiatique, celui qui conduit la très jeune fille de l’adolescence vers l’âge adulte et, dans le monde tumultueux où vit l’homme d’Occident, celui qui – invisible à nos sens – nous mène de nous-même vers nous-même. Dans La Conférence des oiseaux, magnifique texte du poète soufi Attâr (v. 1145 – v. 1221), sous la conduite de la huppe messagère d’amour dans le Coran, des oiseaux entament un long et périlleux voyage vers l’être souverain. Trente parviennent au but. En persan « Sîmorgh » signifie « trente oiseaux ». Sîmorgh se retrouve donc face à Sîmorgh, l’amant et l’aimé ne font plus qu’un, comme Isis et Osiris dont l’union sacrée a donné le jour à Horus, dieu des pharaons. Les trente oiseaux survivants se retrouvent donc face à eux-mêmes et – après ce voyage d’eux-mêmes vers eux-mêmes – ils comprennent que le chemin qu’ils avaient accompli n’était rien… Les trente oiseaux sont désormais « un », et ils s’abandonnent dans la Sîmorgh comme les ombres s’évanouissent dans le soleil.
Dans le cas de Florence Quentin, c’est le Soleil sacré d’Égypte qui baigne délicieusement son existence et son œuvre. L’Ibis sacré, qui se substitue à la huppe, et faisant la navette de la terre au ciel, a été son guide, non pas pour découvrir l’Égypte, mais pour se « ressouvenir ». La mort n’est jamais éternelle. Il se dit qu’aux fils de nos vies, les êtres qui se sont puissamment aimés se retrouvent, et que les lieux que nous avons fréquentés nous habitent et ne sont jamais invisibles. Comme Florence Quentin, chacun devrait porter des Égyptes en son cœur, et surtout en son âme.
Égypte, ta mery, ma terre aimée, terre-miroir, terre-écrin, terre des vivants ô combien ! Des morts glorifiés ô combien ! Terre alchimique du solve et coagula, qui vous dissout pour mieux vous rassembler, Égypte, qui peut littéralement vous "posséder" et même vous conduire au délire.
Florence Quentin, « Vivante Égypte de Gizeh à Philae »
Le délire, voilà le danger qui pourrait guetter les voyageurs – ou les rêveurs imprudents et amateurs d’un ésotérisme frelaté – lorsque l’on aborde cette fabuleuse civilisation sans vouloir en comprendre la symbolique, ou après la lecture d’ouvrages peu sérieux. Dieu sait s’ils sont légion ! Alors que nous commémorons à la fois le bicentenaire du déchiffrement des hiéroglyphes et, depuis un mois, le centenaire de la découverte du tombeau de Toutânkhamon, Florence Quentin fait paraître deux ouvrages : L’Égypte ancienne : vérités et légendes chez Perrin et Comprendre les symboles et des divinités de l’Égypte ancienne chez Hozhoni.
Dans Les sentiers dans la montagne, Maurice Maeterlinck écrit en 1919 : « Il ne faut pas oublier qu’à côté de l’histoire extérieure et scientifique, existe une histoire secrète de l’humanité qui tire sa substance de légendes, de mythes, d’hiéroglyphes, de monuments étranges, d’écrits mystérieux, du sens caché des livres primitifs.«
Florence Quentin ne fait pas partie des esprits raisonnables qui veulent en vain écarter le merveilleux des évènements de la Terre. D’ailleurs, plus les êtres semblent raisonnables, plus ils s’écartent de la raison. En démontant beaucoup de théories fallacieuses ou délirantes, rétablissant les vérités déjà acquises, Florence signe un ouvrage essentiel. Atlantes ou aliens : les pyramides ont-elles été bâties par des « intelligences supérieures » ? L’Égypte fut-elle le premier État centralisé ? La chimie y est-elle née ? Sait-on prononcer cette langue connue par ses hiéroglyphes ? La sortie d’Égypte a-t-elle eu lieu ? Les Égyptiens buvaient-ils de la bière ? Étaient-ils noirs de peau ? Les femmes bénéficiaient-elles d’un régime de séparation des biens ? Voici un florilège de thèmes qui sont abordés dans ce livre essentiel chez Perrin. Même s’il n’y a jamais de merveilleux pour celui qui ne le cherche pas, et que l’Égypte demeure emplie de faits extraordinaires qui échappent aux lois connues, Comprendre les symboles et les divinités de l’Égypte ancienne est, de son côté, un guide formidable et inédit pour celles ou ceux qui voudraient entamer le premier pas de ce voyage vers cette civilisation fascinante.
Mais, le grand mystère de l’Égypte, et c’est bien ce que Florence Quentin nous dévoile avec un immense talent dans toute son œuvre, n’est-il pas celui de la puissance de la vie spirituelle, et de l’espoir d’un au-delà ? Le mystère incarné par l’Égypte n’est-il pas dans le « Livre des morts » qui brise le silence éternel et nous offre une clé afin pouvoir fouler cette Terre où l’on naît à nouveau ? Le grand mystère de l’Égypte c’est de le chercher sans cesse, et sans jamais perdre de vue qu’en nous se trouve cette clé.
Chroniqueur : Jean-Jacques Bedu
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