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La Bible des pauvres – Françoise Chêneau (dir)

En ces temps lointains où l’accès au savoir n’était pas à portée de clic ! Il fallait redoubler d’inventivité pour le mettre à la portée du plus grand nombre.
Tel fut le cas des artistes médiévaux dont les différentes sculptures, vitraux et autres miniatures servirent de véritable catéchèse pour la majorité de ceux qui ne savaient pas lire. Ou encore de ces concepteurs du livre xylographique, ouvrage imprimé dont chaque page était réalisée à partir d’une planche de bois dans laquelle on taillait à la fois la matrice des images et du texte.
Un procédé datant du milieu du XV° siècle – précédent de peu le livre imprimé – dont le document majeur reste la Bible des pauvres (Biblia pauperum), un recueil d’images commentées sur les principaux épisodes de l’Ancien et du Nouveau Testament.
C’est en découvrant, un jour, les magnifiques tapisseries à l’abbatiale de la Chaise-Dieu et leur source d’inspiration majeure que constituait la Bible des pauvres, que Françoise Chêneau donna corps à son projet.

Enchantée par la lecture du livre de l’anglaise Avril Henry « Biblia Pauperum, a facsimile edition », elle se lança dans l’aventure d’une publication, en langue française. Un bien ambitieux dessein, que le hasard des circonstances, providentielles assurément, lui permettra de concrétiser. Ce sera d’abord la rencontre avec une moniale de Prouilhe, sœur Geneviève-Emmanuel, passionnée par les manuscrits contemporains de cette Bible des pauvres, qui en effectuera la traduction et s’acquerra la contribution de plusieurs spécialistes dont celui de Gisèle Besson, experte en latin classique et médiéval.
La participation de Jean-Paul Deremble, spécialisé dans l’iconographie médiévale et sollicité par F. Chêneau, permettra que l’entreprise de l’ouvrage, ébauchée quelque peu en amateur, devienne un produit fini d’excellente facture.

La reproduction au format original des 40 planches de la « Biblia pauperum », telle que présentée dans l’impression xylographique des années 1460 est une réalisation qu’il faut saluer, car elle apporte au lecteur d’aujourd’hui des clefs essentielles pour la compréhension de la spiritualité comme de la création artistique

souligne Christian Heck, professeur d’histoire de l’art dans sa préface.
Parfaite exégèse des grands thèmes de l’Écriture, chacune des 40 planches rassemblées dans un tiré-à-part joint à l’ouvrage, s’inscrit dans un processus de mise en page bien défini. Chacune des pages est formée de compositions symboliques divisées sous forme d’un triptyque.

Au centre, l’on trouve une image tirée des Évangiles ou des Actes encadrée, de part et d’autre, par deux scènes de l’Ancien Testament. Quatre prophètes en buste, deux en haut et en bas du sujet central, tiennent une banderole sur laquelle est résumé le texte prophétique.
Tout un pan d’images et de versets d’origine vétérotestamentaire croisés avec des références évangéliques qui ont pour objectif, de mettre en lumière la figure du Christ révélée par les temps forts du Nouveau Testament.

Telle quelle en tout cas, cette bible théologico-artistique « s’inscrit dans une longue tradition de vulgarisation, à savoir de diffusion à grande échelle des messages sacrés pour le peuple », explique Jean-Paul Deremble.
Ce qui ne veut pas dire qu’elle était directement adressée aux Pauvres, le plus souvent illettrés comme sa dénomination l’indique. Son contenu était prioritairement destiné aux prêtres séculiers et aux prédicateurs d’ordres mendiants qui savaient en tirer la quintessence pour la transmettre auprès des plus humbles.

Soit au total une immense œuvre d’accès aux Écritures et à leur compréhension dont cette Bible des Pauvres désormais traduite en français, nous restitue toute l’importance en nous servant d’un non moins précieux guide de méditation.

Françoise Chêneau (dir.), La Bible des pauvres, Saint-Léger éditions, 17/11/2021, 2 vol. (217 p.), 26 €.

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