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Bien chanceux est celui qui n’a jamais connu « la peur au ventre » et surtout une vie si difficile que le désir de tout quitter, de disparaître à jamais, lui a un instant traversé l’esprit. « Une vie chaotique et détestable », un désir de suicide, vont pousser Bernard – le personnage principal de ce roman aussi fougueux que sensible – à organiser sa disparition dans l’espoir d’une vie meilleure. Roger Blandignères nous offre tous les ingrédients d’un excellent roman. D’une part, il est impossible de le lâcher une fois entamé et – d’autre part – il prend un soin particulier à développer des thématiques différentes dans chacun de ses ouvrages, lesquels nous inclinent à nous identifier à ses personnages.
Dans « La Peur au ventre », l’auteur aborde le thème de la « disparition ». En effet, les statistiques sont terribles : en France, ce sont près de 40 000 personnes qui font l’objet de recherches pour disparitions inquiétantes. Heureusement, près de 30 000 sont retrouvées. Il en reste donc 10 000 qui deviennent des affaires non élucidées. Certaines font l’actualité comme la tristement célèbre énigme Dupont de Ligonnès. D’autres, sont toujours plus tragiques avec des disparitions d’adultes ou d’enfants, victimes de mauvaises rencontres et dont on finit – enfin – par confondre le criminel des dizaines d’année plus tard. Dans le cadre des disparitions, ce sont près de 700 corps que l’on retrouve chaque année, et qui sont enterrés sous X dans la fosse commune. À ce jour, aucune loi ne rend le test ADN obligatoire.
Bernard n’est – bien sûr – pas dans ce cas. Il veut disparaître, car il est écrasé par les dettes et une relation conflictuelle avec sa famille. C’est à tort que l’on a souvent circonscrit Roger Blandignères à un auteur de « romans de terroir », terme qui pourrait être réducteur, car il y a justement d’excellents ouvrages sur ces lieux, qui ne sont connus que d’un petit nombre, et que l’on a plaisir à découvrir sous des plumes poétiques. Personnellement j’ai aimé retrouver le petit village de Corsavy où j’allais dans mon enfance, et en particulier cette pittoresque auberge au charme d’antan, « Chez Françoise », où l’on accède par une petite épicerie. Mais Roger Blandignères va nous entraîner bien plus loin que ce petit village du Vallespir situé sur le massif du Canigou, le mont sacré des Catalans… Je me garderai bien de révéler la suite de ce roman haletant et riche en rebondissements. Comme nous le laisse imaginer l’auteur sur la quatrième de couverture : « Le destin lui sera-t-il plus favorable ? Rien n’est moins sûr… »
« La Peur au ventre » est le quatorzième roman de Roger Blandignères qui peut se targuer d’avoir un véritable et fidèle lectorat que beaucoup de romanciers lui envieraient. Son talent est de conjuguer une thématique sérieuse et contemporaine, au sein – pour ceux qui ont la chance d’habiter le beau département des Pyrénées-Orientales – de lieux qui leur sont familiers. C’est ainsi qu’il a traité les thèmes de :

  • L’adoption dans « L’Enfant déraciné ».
  • L’ictus amnésique dans « La Mémoire dans la peau ».
  • La violence conjugale et l’autisme dans « Le Crayon cassé ».
  • L’addiction au jeu dans « Tu m’avais pourtant promis ».
  • La double vie dans « Les Roses pourpres ».
  • L’héritage, si souvent objet de controverses, dans « L’Héritage de mon grand-père ».
  • Le harcèlement sexuel et moral dans « Le Ballet des méduses ».

Il reste encore une multitude de sujets pour cet auteur travailleur, prolixe et talentueux. Ce que nous pourrions lui souhaiter pour cette année et les futures : qu’un éditeur d’envergure nationale lui donne enfin l’audience qu’il mérite. Il en a toutes les qualités.

Jean-Jacques BEDU
contact@marenostrum.pm

Blandignères, Roger, « La Peur au ventre », Roussilon éditions, 09/2020, 1 vol. (258 p.), 15,00€.

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