Rony Mecattaf, La Blessure qui guérit, Éditions Erick Bonnier, 11/03/2025, 206 pages, 20€
Alors que le Liban marque aujourd’hui le cinquième et douloureux anniversaire de cette déflagration qui a soufflé le cœur de Beyrouth, et que l’impunité continue de ronger la mémoire collective d’une nation qui attend toujours les noms des responsables, le récit autobiographique de Rony Mecattaf, La Blessure qui guérit, acquiert une résonance particulière. L’ouvrage déploie une odyssée intérieure où la cicatrice, individuelle et collective, devient à la fois boussole et territoire. Il procède d’une alchimie subtile, transformant le plomb du traumatisme en l’or d’une conscience aiguisée, offrant une cartographie intime dont la portée résonne avec les questionnements universels de notre époque.
L’onde de choc initiale, celle de l’explosion du 4 août 2020 qui arrache à Rony Mecattaf l’usage de son œil droit, devient le point de départ d’une exploration vertigineuse. Le corps meurtri se fait l’écho du corps morcelé du Liban, et la blessure individuelle ouvre sur une méditation profonde de la condition humaine. C’est ici que l’art du témoignage incarné de Rony Mecattaf révèle sa puissance. L’écriture se déploie à partir d’un “je” qui accepte sa propre vulnérabilité pour mieux la transcender, mû par une injonction reçue de son mentor, l’écrivain Alexandre Najjar : “Cette histoire ne t’appartient plus. Tu dois la raconter.” Dès lors, le récit personnel quitte la sphère de l’anecdote pour devenir un acte de transmission, un passage de relais.
L’onde de choc initiale, celle de l’explosion du 4 août 2020 qui arrache à Rony Mecattaf l’usage de son œil droit, devient le point de départ d’une exploration vertigineuse. Le corps meurtri se fait l’écho du corps morcelé du Liban, et la blessure individuelle ouvre sur une méditation profonde de la condition humaine. C’est ici que l’art du témoignage incarné de Rony Mecattaf révèle sa puissance. L’écriture se déploie à partir d’un “je” qui accepte sa propre vulnérabilité pour mieux la transcender, mû par une injonction reçue de son mentor, l’écrivain Alexandre Najjar : “Cette histoire ne t’appartient plus. Tu dois la raconter.” Dès lors, le récit personnel quitte la sphère de l’anecdote pour devenir un acte de transmission, un passage de relais.
La prose de Rony Mecattaf est à l’image de son cheminement : méditative, exigeante et traversée par une douce clarté. Cette articulation trouve son expression la plus audacieuse dans le chapitre “L’Autre”, où Rony Mecattaf aborde, avec une franchise désarmante, les territoires de sa sexualité. L’exploration du désir homosexuel, des errances addictives et de la quête d’une masculinité fluide est présentée comme une étape fondamentale de son processus d’intégration. En appliquant la même lucidité à ses failles intimes qu’à sa pratique thérapeutique, il démontre que la guérison holistique requiert une confrontation courageuse avec toutes les facettes de l’être.
Le livre est structuré autour de la grille de lecture – triptyque corps, psyché, esprit – qui lui permet de décomposer le processus de guérison en une quête d’équilibre dynamique. Dans une approche empreinte d’ouverture, Rony Mecattaf invite à un dialogue permanent entre ces dimensions, illustrant combien la santé de l’âme est indissociable de l’écoute du corps et de l’ouverture au transpersonnel. C’est dans cette quête que l’ouvrage convoque une intelligence symbolique saisissante. La blessure résonne avec les figures mythologiques du guérisseur blessé, Chiron ou Horus, où la perte devient la condition d’une vision nouvelle. Cette exploration des archétypes se prolonge dans les chapitres dédiés aux états modifiés de conscience, via le yoga tantrique ou les pratiques chamaniques, présentés comme des outils d’accès à une connaissance de soi qui embrasse les ombres pour mieux en extraire la lumière.
Au fil des pages, la blessure physique se révèle être un catalyseur existentiel qui pousse Rony Mecattaf à revisiter ses racines, son parcours et son engagement. Le livre se mue en une réflexion éthique sur la posture à adopter face aux effondrements collectifs. Fidèle à la pensée d’Albert Camus, Rony Mecattaf plaide pour une attitude qui concilie liberté et responsabilité. Cette même exigence de vérité l’amène à poser un regard lucide et sans concession sur les dynamiques géopolitiques qui ont meurtri sa terre natale, notamment à travers une critique argumentée du sionisme, qu’il relie aux fractures profondes du Liban et du Moyen-Orient. Son engagement, intellectuel et intime, s’incarne dans une présence au monde qui refuse les simplifications.
La Blessure qui guérit est une œuvre de maturation. L’histoire de résilience que Rony Mecattaf y partage s’élargit en une boussole pour naviguer les tempêtes intérieures et collectives. La parole, tel le boomerang qu’il évoque, revient à son lanceur, lestée de sens et prête à être offerte. C’est dans ce mouvement que le récit atteint une dimension universelle, nous rappelant que nos fêlures les plus profondes peuvent devenir les sillons fertiles où germe notre humanité la plus vraie.

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