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Une analyse rigoureuse pour comprendre l’impasse palestinienne

Monique Chemillier-Gendreau, Rendre impossible un État palestinien. L’objectif d’Israël depuis sa création. Éd. Textuel. Paris, 14/05/2025, 176 pages, 17,90€

Son analyse rigoureuse nous permet de comprendre à la fin de l’ouvrage pourquoi, aujourd’hui, la solution à deux États semble devenue une illusion diplomatique. Ce travail documenté s’appuie sur les textes du Droit international, sur une solide argumentation historique et juridique, depuis la Déclaration Balfour de 1917 jusqu’aux résolutions récentes de la Knesset (juillet 2024), qui officialisent le refus d’un État palestinien, les résolutions de l’ONU, et l’histoire politique du conflit israélo-palestinien. Elle revient également sur les accords d’Oslo, dont elle souligne l’ambiguïté et l’échec, en relevant un fait souvent mis de côté, le fait que l’Autorité palestinienne a été privée de tout pouvoir régalien, décisif et déterminant, réduisant son action à une illusion étatique.

L’auteur démonte avec rigueur la fiction diplomatique de la « solution à deux États », qu’elle considère comme un leurre depuis l’origine du conflit israélo-palestinien. Selon Monique Chemillier-Gendreau, Israël a, dès sa création en 1948, méthodiquement empêché l’émergence d’un État palestinien, en s’appuyant sur une stratégie de colonisation, de fragmentation territoriale, de déplacement forcé des populations et de manipulation juridique. L’inaction de la communauté internationale, et des Nations unies ont permis par leur silence ou leur fausse implication l’expansion territoriale israélienne et l’occupation illégale permanente, de plus en plus prégnante et active depuis le 7 octobre 2023. La Cour internationale de justice, dans un avis consultatif de juillet 2024, avait pourtant confirmé l’illégalité de cette occupation prolongée et l’annexion de facto des Territoires palestiniens.

De son côté pour des raisons sécuritaires le Gouvernement d’Israël actuel se drape dans l’exercice d’un Droit qu’il bafoue ad intra et ad extra sans cesse. Prenons l’épiphénomène qu’est l’interdiction du drapeau palestinien qui reste criminalisé en Israël. Aujourd’hui, et cela se vérifie jour après jour d’une façon critique, l’État palestinien est devenu pratiquement impossible à réaliser, à moins d’un renversement radical des rapports de force. Elle appelle à des sanctions internationales, au démantèlement des colonies, au respect du Droit au retour des réfugiés et à la réparation à l’endroit des Palestiniens. Selon elle, il ne peut y avoir de paix sans reconnaissance du droit du peuple palestinien à l’autodétermination, au retour, à la réparation, et à la souveraineté. Ce n’est qu’au prix de sanctions internationales et de la fin de l’impunité que la justice pourra émerger. Qu’en est-il aujourd’hui ? Gaza reste juridiquement occupée malgré le retrait de 2005. La Cisjordanie est fractionnée. Jérusalem-Est est confisquée. Sur le front de la guerre c’est la mort qui est le quotidien des Gazaouis (principalement les civils, les femmes et les enfants), la famine, la désolation, l’absence de soins efficaces réels, le manque d’eau, d’habitation, de salubrité…

La pseudo-victoire d’Israël se fera sur un monceau de morts comme jadis devant les Philistins prenant pour justification sa sécurité, la délivrance des otages (cela ne se reflète qu’à la marge pour le gouvernement), et l’éradication du Hamas. Tout cela ce sont des prétextes, et malheureusement le Hamas a donné l’occasion à Israël de faire ce qu’il avait planifié depuis très longtemps… Le tribunal de l’Histoire et la mémoire des Hommes jugeront le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou, et son Administration à jamais entachés d’ignominie.

Monique Chemillier-Gendreau avec Rendre impossible un État palestinien, nous partage un regard engagé et rigoureux permettant d’ouvrir de nouvelles perspectives autour de ce débat, et de cette question de plus en plus brûlante. Ce n’est plus la coexistence qui est en jeu, mais la reconnaissance d’une injustice historique systémique et l’existence même du Peuple palestinien. Elle ne cherche pas à minimiser la responsabilité occidentale ni la crise du Droit international ; et ni la question de l’implication de l’ONU et de sa réelle force aujourd’hui dans le contexte international. Bien sûr ce texte exigeant dérange à sa lecture autant qu’il éclaire, mais son analyse précise nous permet de comprendre à la fin de l’ouvrage pourquoi, aujourd’hui, la solution à deux États semble devenue une illusion diplomatique.

Ce livre a l’avantage de susciter le débat en interrogeant les récits dominants, en revenant sur les « storytelling » pour lire de nouveau frais la mémoire, et la responsabilité pour autrui si chère à Emmanuel Lévinas. Parfois ne faut-il pas se faire violence pour que l’Homme reste un homme, et que nos actions politiques soient à la hauteur de ce que nous avons si chèrement défendu jadis ?!? Comme l’avait écrit Primo Levi, et cela est valable des deux côtés des belligérants, « Si c’est (encore) un Homme » nous trouverons ensemble les moyens (enfin) pour rendre possible la création d’un État Palestinien aux côtés d’un État israélien. Malheureusement, la « solution à deux États » semble ne plus être une option réaliste du fait que le territoire palestinien est désormais morcelé, colonisé et sous occupation militaire. Qu’en sera-t-il demain d’un territoire vidé de ses habitants au profit d’une occupation violente ne respectant ni le Droit ni la morale ? À lire !

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