Dans son ouvrage « Vivre ! Dans un monde imprévisible », Frédéric Lenoir nous soumet quelques pistes pour nous aider à vivre dans ce monde imprévisible, frappé par la plus grande crise sanitaire du XXIe siècle : la Covid 19.
Cette crise entraîne dans son sillage une crise économique, sociale, écologique ainsi que des secousses qui provoquent, à leur tour, des dégâts affectifs et émotionnels au niveau des individus. Le premier réflexe est d’aller au plus vite afin de revenir au monde d’avant. Cela paraît illusoire car on ne peut, d’une part, sortir d’une telle crise en quelques mois ; et, d’autre part, celle-ci a des causes très profondes et surtout systémiques. Elle s’inscrit dans un monde globalisé et complexe.
Frédéric Lenoir nous propose trois issues, dont la première piste est celle qui fait appel à la sagesse des philosophes stoïciens et épicuriens. La seconde emprunte des idées aux psychologues comme Abraham Maslow et aux psychiatres tels que Boris Cyrulnik qui peuvent être le chaînon manquant à la pensée de l’auteur. Enfin, la troisième piste vient tout droit des neurosciences, lesquelles nous fournissent les neuromédiateurs. Ceux-ci libèrent des substances chimiques qui contribuent, chacune à leur manière, à l’activité de nos cerveaux ; pour ne citer que la dopamine, et la sérotonine bien connues des scientifiques. Certains de ces neuromédiateurs procurent un sentiment de satisfaction, de motivation et d’appétit de vivre. D’autres favorisent la créativité, l’intuition, le goût de l’aventure et parfois la prise de recul, la bienveillance et le dévouement.
En effet, dans cette situation de crise, l’homme doit redevenir libre. Il ne doit pas se laisser infantiliser ni imposer une nouvelle idéologie qui serait le « pan-médicalisme » que décrit le philosophe André Comte-Sponville, c’est-à-dire le fondement d’une nouvelle civilisation qui ferait de la santé l’alpha et l’oméga de la vie économique, politique, écologique et sociale.
Cette affirmation de Baruch Spinoza nous conforte dans cette idée : « Lorsque nous sommes fragilisés, angoissés, déstabilisés, il n’y a sans doute pas de meilleur remède que de rechercher ce qui nous procure du plaisir ou de la joie. » Nous pouvons en relever quelques exemples dans les moments suivants : savourer des mets que l’on aime, faire du sport, cultiver son jardin, écouter un morceau de musique, faire du yoga, méditer, regarder un film qui nous met de bonne humeur, lire des poèmes ou apprécier un bon vin. Spinoza affirme aussi : « Un effet ne peut être supprimé au contraire que par un effet plus fort, ou contrarié par un effet plus fort que l’affect a contrarié. »
Frédéric Lenoir propose de remettre au cœur de notre vie la recherche de la justice, la quête de la liberté et le désir d’amour, même si l’idée de la mort nous hante. Il se réfère aussi à Montaigne lorsque celui-ci affirme que « Philosopher, c’est apprendre à mourir ». Ainsi, le penseur du XVIe siècle nous amène à apprivoiser la mort, à créer du lien et à vivre en homme libre malgré les traumatismes.
En attendant, Frédéric Lenoir nous exhorte à méditer sur la citation du psychologue Carl Gustav Yung, citée dans la préface de son ouvrage : « Les crises et les bouleversements, la maladie, ne surgissent pas au hasard. Ils nous servent d’indicateurs pour rectifier une trajectoire, explorer de nouvelles orientations et expérimenter un autre chemin de vie ».
Anatole KOTEREKO
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Lenoir, Frédéric, « Vivre ! Dans un monde imprévisible », Fayard , »Documents », 17/06/2020, Disponible, 1 vol. (136 p.), 14,00€.
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