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Petites histoires de la mode – Martine Magnin

Le langage est l’une des façons par lesquelles l’humanité articule ses pensées. Georg Wilhelm Friedrich Hegel ira même jusqu’à affirmer qu’il en est l’unique moyen. Il écrit que tenter de penser sans utiliser le langage est une absurdité. Notre monde tourne autour de lui ; chaque objet avec lequel nous entrons en contact est caractérisé dans notre cerveau par des mots, chacune de nos pensées se construit à l’aide de phrases.
Toutes les disciplines possèdent leur propre langage, et leur vocabulaire spécifique. Avec les « Petites Histoires de la Mode », Martine Magnin nous ouvre les portes de l’univers linguistique du monde de l’habillement. Véritable dictionnaire, cet ouvrage regroupe frises chronologiques, anecdotes, étymologies, et définitions détaillées, faisant du profane un véritable maître lorsqu’il est question du lexique se référant à la mode et à ses dérives.

Au carrefour de l’individualisme, l’économie, la politique, et la cause environnementale, le vêtement est bien plus qu’un outil pour se couvrir. Chaque manifestation de la mode cache une histoire, une légende, un savoir-faire unique. Ainsi, l’auteur nous emmène dans une folle aventure, enquêtant sur le mode de fabrication des différentes matières, nous apprenant que la laine provenant de l’alpaga fut surnommée « fibre des dieux » par les Incas, qui la réservaient à leurs rois pour des cérémonies, ou encore que le « denim » signifie « de Nîmes », rappelant la ville d’origine de cette toile, depuis devenue emblème de l’Amérique.
De l’Andalousie, où nous assistons à l’invention du boléro, gilet court inspiré de la tenue des danseurs espagnols, qui, à leur tour, ont influencé Maurice Ravel lors de la composition de son propre boléro, ballet aux airs andalous, Martine Magnin nous fait voyager jusque sur les navires de terrifiants pirates affublés de cuissardes dans lesquelles ils cachent leur butin. C’est d’ailleurs pour cette raison que le port de ces bottes à haute tige, jugé trop érotique, fut interdit pour les femmes jusqu’au XIX° siècle. Ce n’est bien entendu pas la seule prohibition dont la mode fut victime. Moult édits somptuaires furent adoptés à travers les ans pour limiter l’excès des cols ou des broderies.

Acrylique, béret, caftan, képi, liquette, plastron ou zibeline, tout ce qui exprime l’habillement est décrit avec simplicité et humour dans cet ouvrage, guide pratique pour l’apprenti ou le simple curieux. Martine Magnin n’exclut rien : de l’expression populaire « fashion-victim » à l’habit religieux, en passant par le terme indéfinissable de « l’élégance ». Elle nous offre un regard neuf sur la composition de nos armoires, s’assurant que nous ne voyons désormais un tailleur en tweed d’inspiration Chanel, ou une Saharienne Yves St Laurent pour ce qu’ils sont réellement ; c’est-à-dire un tissu destiné à protéger du froid les fermiers écossais, et une veste militaire utilisée par les troupes britanniques lors de la colonisation de l’Inde.
Il est souvent dit que la mode est un univers fermé ou élitiste, mais « Les Petites Histoires de la Mode », vous en ouvriront les portes avec simplicité et humour.

Éliane BEDU
articles@marenostrum.pm

Magnin, Martine & Jamblinne, Mathilde de, « Petites histoires de la mode », Jourdan, 21/02/2021, 1 vol. (455 p.), 20,90€

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Notre coup de cœur de la semaine est une belle révélation  Aimer pour rien de Camille de Villeneuve, aux Éditions du Cerf.

À contre-courant d’une époque où tout se compte, cet essai brillant nous invite à une révolution intime. En convoquant mystiques et philosophes, l’autrice démonte les pièges de la jalousie et de la possession pour nous offrir une vision solaire de l’amour.

C’est un livre qui apaise et élève. Il nous propose le plus beau des défis : accueillir l’autre dans sa totale liberté, sans marchandage. Une lecture essentielle pour réenchanter nos relations.

Apprendre à aimer pour rien, c’est enfin commencer à aimer vraiment.

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