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À plusieurs reprises l’Histoire a été traversée par des épisodes d’épidémies dévastatrices : peste noire, lèpre et choléra, variole, tuberculose, typhus, grippe espagnole, Ebola, etc… Nonobstant la COVID 19 (au féminin selon l’Académie Française) s’habille d’une dimension tout à fait différente. En effet, cette épidémie se développe dans un monde ouvert à la communication et sans guerre déclarée ouvertement. Les morts ne se comptent plus sur les champs de bataille, des tranchées ou les plages de débarquement. Ils existent au travers des médias, des plateaux de télévision, et dans le discours des dirigeants politiques qui rassurent davantage à défaut de convaincre. Le milieu médical est pris de court et ne cesse de se déchirer. La société se protège et dans l’incertitude la contestation s’installe. Les précautions sanitaires dictent un nouveau modèle de vie et un comportement prétendument adapté.

Nous voilà déchirés aujourd’hui entre hasardeuses décisions politiques et les incertitudes médicales vis-à-vis d’un virus d’un genre nouveau. Cette affection moderne marque tous les esprits, car elle frappe indifféremment toutes les couches de la société. C’est tout le sens de l’ouvrage d’Alain Bauer et de Roger Dachez et qui est document particulièrement exhaustif, riche de sources historiques et médicales.

Pour éradiquer un mal il faut en découvrir l’origine, sa force de contagion et sa capacité à muter. Les importants échanges commerciaux planétaires sont les facteurs prépondérants de la propagation d’une pandémie. Certes des précautions de mises en garde sont nécessaires, mais pas toujours suffisantes : « l’État aura donc un rôle considérable à l’avenir, car le marché est en train de se désengager de la bataille contre les maladies infectieuses » (p.96) Avertissement à prendre en compte pour les pandémies futures ! Pour mieux se préparer des mesures s’imposent :

  • Constitution d’une cellule de crise.
  • Information des publics.
  • Préparation d’une phase critique.
  • Formation des professionnels de santé et leur recrutement.
  • Renforcer la détection des échanges sanitaires.
  • Assumer les frontières.
  • Regrouper les commissions et les Comités permanents pour en diminuer le nombre.

L’abondance des acronymes (EPRUS – UGAP – AFSSAPS – CBCM – CRSA – SGDSN – CIC – CORRUSS etc…) qui identifient des cellules de réflexion et mettent en lumière les indépendances qui alourdissent les capacités de décision, de prévention (port du masque) ou de vaccination en particulier. Le manque de clarté entre les différents ministères (Santé et Intérieur par exemple) a ralenti les efforts consentis pour maîtriser rapidement la crise : disponibilité des stocks, mobilisation des personnels de santé, mise en place de vaccination se sont heurtées au manque d’anticipation et facilité l’expression des rumeurs sur les hésitations officielles : « mais au-delà des masques, il faudra ainsi gérer la pénurie des tests, des respirateurs, des surblouses, des charlottes, des écouvillons… Une débâcle traitée par la presse avec un mélange de stupéfaction et d’indignation ». (p 195.)

Les auteurs nous rappellent que « La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen a le droit de demander des comptes à tout agent public de son administration ».

La pandémie est une affaire trop sérieuse pour être négligée. Les troubles sociaux et économiques qu’elle engendre, pèsent très lourdement sur une collectivité. Pourtant c’est à l’État d’y faire face pour éviter des facteurs d’insécurité comme la panique, la contestation, la contagion et l’exploitation terroriste. La réponse se trouve, d’une part, dans la coordination d’une cellule de crise interministérielle qui gère et anticipe, d’autre part, dans la logique d’une solidarité européenne.

Cet ouvrage accompli, bien documenté et objectif, attire notre attention sur les avertissements du Conseil Scientifique. Voici l’essentiel de ce qu’il préconise pour assurer la continuité sociale et économique du pays :

  • Préserver la solidarité et les libertés individuelles
  • Appeler au sens civique des citoyens
  • Veiller à la transparence de l’information

Se dégagent surtout de cette analyse :

  • D’une part, le renforcement et l’anticipation de l’outil hospitalier.
  • D’autre part, la mesure précise des conséquences d’un confinement.
  • Enfin, l’accompagnement des activités professionnelles.

Ce manuel nous prépare aux maux et aux risques futurs qui se profilent. Ce livre technique, bien documenté, et qui – même s’il date d’octobre 2020, demeure une source précieuse pour affronter les incertitudes à venir et, comme l’on si bien écrit les deux auteurs : « Il ne sert à rien de nier la réalité : elle gagne toujours. Et se préparer aux crises ne les empêche pas de survenir mais permet d’y survivre ».

Alain VALS
articles@marenostrum.pm

Bauer, Alain & Dachez, Roger, « Comment vivre au temps du coronavirus : un manuel pour comprendre et résister », Le Cerf, 09/10/2020, 1 vol. 20,00€. EPub : 9,99€.

Professeur de criminologie au Conservatoire National des Arts et Métiers, à New York et Shanghai, Alain Bauer est responsable scientifique du pôle Sécurité Défense, Renseignement, Crises et Cybermenaces. Membre d’un réseau international de gestion des crises depuis 2001, il conseille des institutions et des entreprises. Il a publié une soixantaine d’ouvrages traduits dans une dizaine de langues sur les questions de sécurité.

Médecin et universitaire, Roger Dachez a notamment publié une « Histoire de la médecine des origines à nos jours » et a enseigné cette discipline à l’Université Paris 7-Denis-Diderot. Il est président de l’institut Alfred-Fournier, à Paris, organisme reconnu d’utilité publique et spécialisé depuis près d’un siècle dans les maladies transmissibles.

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