La vie de Jésus – Andrea Tornielli

Plonger dans La Vie de Jésus, d’Andrea Tornielli, c’est renouer avec la tradition des marginalia. Un délice et de belles découvertes pour le lecteur, confronté à plusieurs voix : celles des Évangiles, celle du narrateur et les commentaires du pape François.
L’entreprise pourrait paraître un peu vaine, sinon redondante. Après tout, il n’y a pas moins de quatre témoignages pour rapporter les faits signifiants de la vie de Jésus. Combien d’exégètes, depuis deux millénaires, combien d’historiens se sont penchés sur chaque mot, chaque geste ? Et le pape François d’insister pourtant, de recommander inlassablement “à tous un contact direct et quotidien avec les Évangiles“. Pour entretenir la relation à l’autre, il est nécessaire de le fréquenter souvent. “L’amour nécessite un dialogue permanent“, précise-t-il dans la préface au livre d’Andrea Tornielli, directeur éditorial du dicastère pour la communication du Vatican et auteur d’un grand nombre d’ouvrages.
Cette Vie de Jésus peut permettre aux plus curieux de (re-)découvrir Jésus, dans un dialogue vif avec le texte sacré. La narration ne vient pas donner de la chair aux Évangiles qui n’en manque pas ; elle vient élargir la vocale à la manière d’une loupe qu’on éloignerait ou rapprocherait. Il développe, sans inventer. Là où le Nouveau Testament se fait direct, presque abrupt, dans sa fonction de témoignage, centré sur l’essentiel, Andrea Tornielli permet au lecteur de contextualiser ; ici, de donner une explication ; là, de décrire davantage une scène telle qu’elle aura pu se dérouler. Ce n’est pourtant pas une œuvre d’imagination qui offrirait au lecteur des scènes inventées. Au fil du texte s’insèrent en italique d’abondantes citations des Évangiles, de sorte que c’est bien ce texte-là dans lequel on se baigne. La Parole se mêle à la narration aussi aisément que se mélangent l’eau et le vin.
Et puis, au fil des pages, les commentaires du pape François, tirés de ses homélies, de ses discours ou de ses lettres apostoliques viennent enrichir, comme des notes en marge, un texte déjà abondant. Clairement identifiables, ils ne viennent pas, contrairement à ce que l’on pourrait penser, ralentir la lecture. Non. Ils permettent une pause, une méditation, une respiration. C’est tout le talent du jésuite François que de se mettre à la portée de tous : il enseigne au plus grand nombre, non pas à quelques théologiens et exégètes. Il explique simplement, avec le cœur. Ainsi commente-t-il la naissance de Jésus : “Quelle surprise de voir Dieu adopter nos propres comportements : il dort, il tète le lait de sa mère, il pleure et joue comme tous les enfants !” Ou encore, lorsque venu à Jérusalem pour sa présentation au Temple, Marie et Joseph le cherche trois jours durant : “Cette angoisse qu’ils éprouvent […] devrait être notre angoisse lorsque nous sommes loin […] de Jésus.“
Ce n’est pas ici l’œuvre d’un théologien ou d’un scoliaste. Andrea Tornielli nous offre un texte sensible, d’une grande connaissance des Évangiles qu’offre leur fréquentation assidue. Les néophytes trouveront dans cette Vie de Jésus un accès plus aisé au texte initial, tandis que les habitués y trouveront matière à renouveler leur lecture quotidienne.

Il est facile de croire que l’on connaît déjà tout des gestes de la vie de Jésus. La Bible reste le livre le plus lu et le plus vendu au monde. Récemment encore, le livre de Jean-Christian Petitfils et celui de Jean Staune ont été des succès de librairie. Jésus ne cesse de nous parler, de nous intriguer, de nous fasciner. C’est peu de le dire ! En ces temps de Carême, il n’est pas inutile de suivre à nouveau les pas du Jésus des Évangiles, et, pourquoi pas, de relire, comme un roman, les actes de cet homme qui, il y a deux mille ans, a bouleversé l’histoire du monde.