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Grégoire Delacourt, Une nuit particulière, Grasset, 01/03/2023, 1 vol. (193 p.), 19€.

Dans son tout dernier roman, Une nuit particulière, Grégoire Delacourt tisse le destin de deux âmes solitaires, qui renvoie au cliché de l’iconique film de Claude Lelouch, Un homme et une femme. Aurore et Simeone, amants d’une nuit, se questionnent sur l’amour et la vie. « Penses-tu que l’on puisse mourir d’amour ? » lui demande-t-elle. « Je crois plutôt qu’on peut en vivre », lui répond-il.

J’avais envie d’amour. Envie d’une grande nuit d’amour. D’une rencontre. De ce moment étrange, poétique parfois, qui change le cours de l’eau d’une vie. Je voulais comprendre jusqu’où l’on peut aimer, jusqu’où l’on peut aller vers l’autre et ressentir que chaque pas est un choix. Je rêvais d’entendre à nouveau quelques airs d’opéra, des arias de douleur et de beauté, et retrouver ces hommes et femmes capables de se jeter dans le vide par amour. Parce que c’est vivre sans amour qui est l’enfer.

Après un roman introspectif et profondément personnel, dans lequel Grégoire Delacourt s’est dévoilé tout en cherchant à guérir un traumatisme d’enfance, il nous présente aujourd’hui un roman d’amour se déroulant durant une nuit singulière. S’éloignant de l’amour sombre et tourmenté de L’enfant réparé, il nous offre ici un amour lumineux, même s’il est également teinté de tragédie et d’éphémère. Dans Une nuit particulière, deux solitudes se rencontrent le temps d’une nuit mémorable. Elle s’appelle Aurore. Et pourtant, c’est au crépuscule qu’elle rencontre Simeone, un soir d’automne, à Paris, aux abords du local d’un groupe de parole. Elle sort d’une réunion, lui arrive pour la suivante. Il attend, l’observe, intrigué, mais c’est elle qui l’aborde. Le temps d’une cigarette, la conversation s’engage. Deux âmes se découvrent ainsi au gré des volutes de fumée.
Après trente ans d’un amour fou et dévorant, Aurore fait face à l’abandon imminent de son mari. Quant à Simeone, la maladie ronge sa gorge, emportant avec elle les jours qui lui restent à vivre ; il refuse de se battre, et sa femme tremble de peur. Ainsi, ces deux étrangers s’aventurent côte à côte dans une nuit qui demeurera unique : des rues de Paris envoûtantes à un bar nocturne, d’une chambre d’hôtel éphémère à un aller-retour en taxi vers Roissy, avant de s’évader vers les rivages dorés de l’aube. Première ou ultime nuit, ils l’ignorent. Une seule certitude les habite : au matin, après cette bouleversante étreinte amoureuse, plus rien ne sera jamais pareil. Car l’amour, insaisissable, ne s’écrit jamais à l’avance.
La rencontre d’Aurore et Simeone se déroule dans un univers empreint de magie et de mélancolie. Leurs errances nocturnes dans les rues de Paris et leur évasion vers l’aube symbolisent à la fois la fuite du temps et la quête éperdue d’un amour éphémère mais inoubliable.
Narrant tour à tour les pensées d’Aurore et de Simeone, l’histoire dévoile l’amour sous ses multiples facettes. Grégoire Delacourt, tel un caméléon, se glisse dans la peau d’une femme, puis dans celle d’un homme, pour nous immerger dans leur intimité. Sa plume, alliant poésie et émotions brutes, nous entraîne au cœur de ces deux êtres, sacrifiant parfois la crédibilité des dialogues pour nous offrir des phrases qui touchent en plein cœur.

Je suis de celles qu’on blesse et qui chérissent leurs blessures. De celles qui meurent parce que l’autre meurt.

Au fil de cette nuit hors du temps, Aurore et Simeone déambulent dans la ville, se dévoilant l’un à l’autre à travers leurs conversations et leurs confidences. Leurs échanges, bien que parfois teintés d’irréalisme, sont chargés d’une sincérité poignante. À travers cette rencontre inattendue, l’auteur nous convie à méditer sur la nature de l’amour, sa fragilité et sa puissance.

Grégoire Delacourt compose ici un récit envoûtant qui, bien qu’il s’étende sur une seule nuit, scellera à jamais le destin d’Aurore et de Simeone.

Cette chronique a été publié sur le site d’ICI BEYROUTH

Image de Bélinda Ibrahim

Bélinda Ibrahim

Chef du service Culture D'Ici Beyrouth

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