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La Covid-19 qui, en cette période de trouble mondial, paralyse et terrifie notre civilisation, montre la fragilité économique et humaine et nous fait réaliser que la réalité pandémique est le pire scénario des films apocalyptiques affreusement vécu en live qui soit. “Pandémies au cinéma” est un voyage à travers les époques et les pays où l’arrivée d’une catastrophe, la fin du monde avec la panique inhérente, prend les apparences les plus variées : morts-vivants, virus, germes extraterrestres. L’auteur résout le questionnement existentialiste en trois étapes : la contamination ou la peur d’être soumis à une maladie contrôlant le corps, la privation de libertés liée au confinement enfermant hommes et femmes, l’angoisse générée par les médias propageant de mauvaises et anxiogènes nouvelles. Ainsi, les trois parties (qui sont aussi des chapitres, chaque film clé étant une section) donnent lieu à une suite d’études sur des œuvres phares sur la même présentation : analyse d’un film (2/3 pages) suivie de “Pour aller plus loin”, une proposition de 4/5 films (1 page). Plus qu’un essai, l’ouvrage est une succession de fiches conséquentes. “Verdict : contagion”, la première partie, présente “La nuit des morts vivants”, “Zombie : le crépuscule des morts-vivants”, “Mauvais sang”, “Alerte !”, “28 jours plus tard”, “Phénomènes”, “Contagion”, “Pandémie”, “It’s Comes at night”, “Annihilation”. On peut être étonné que “Le septième sceau” de Bergman, à défaut d’être étudié, ne soit simplement pas mentionné. Ce film, incontournable, magnifie la peste noire médiévale et souligne les tourments des hommes. Autre film oublié, “Nosferatu le Vampire” de Friedrich Wilhelm Murnau – le vampire friand de sang étant, il ne faut pas l’oublier, aussi porteur de la Peste noire – “L’aurore” lui étant préféré. De fait, l’auteur, écarte les peste, lèpre et choléra, et ne s’intéresse qu’aux pandémies du XXe siècle : virus, sidas, grippes, ce qui est regrettable du point de vue historique. A contrario, dans le domaine de l’anticipation, s’agissant des microbes et des bactéries, “La guerre des mondes” est oubliée dans ses deux versions de 1953 et 2005. Là, retournement de situation, les microbes et les virus n’attaquent pas l’Homme immunisé mais les extraterrestres qui meurent terrassés. Plus étonnant est Entre quatre murs, la seconde partie, consacrée à l’enfermement, notamment à la folie (meurtrière, solitaire, érotique…). De fait, il manque à ce livre une définition précise de la pandémie qui est, au sens strict, une maladie contagieuse à échelle continentale. Si la folie est bien une maladie avec la schizophrénie “d’El” ou les pulsions érotico-meurtrières de “La vie criminelle d’Archibal de la Cruz” (non étudiés ou mentionnés) de Buñuel (l’auteur cite “Belle de jour”), elle n’est pas contagieuse. Par contre, la peur de la maladie est bien un élément de propagation. L’auteur s’attache à “La corde”, “La chatte sur un toit brûlant”, “Le limier”, “Shining” et, même, “L’Empire des sens”… Ces films sont d’incontestables chefs-d’œuvre du 7° art et le confinement mental est bien étudié, mais ont-ils leur place dans un livre sur les pandémies ? Force est de constater que le titre induit en erreur le lecteur en attente d’un ouvrage uniquement consacré aux pandémies au cinéma. “Mortem ex machina” soulève la même question avec “Metropolis”, “2001, l’odyssée de l’espace”, “Mondwest”, “Blade Runner”… A contrario, l’emblématique “Matrix”, avec les virus informatiques, est au cœur du sujet. Une bibliographie cinématographique, pandémique, sociétale et généraliste, des liens internet, des références des films (précédées par leurs réalisateurs) et un index des noms, ferment le tout. Pour conclure, ce livre d’actualité au titre accrocheur, bien écrit, est le premier sur les pandémies au cinéma, d’où des oublis et des raccourcis. On regrettera que la première partie ne soit plus approfondie ou ne l’emporte sur les deux autres. S’agissant d’un livre dystopique, on restera sur sa fin…

Albert MONTAGNE
articles@marenostrum.pm

Ortéga, Julien, “Pandémies au cinéma : 1919-2019 : un siècle d’anticipation”, L’Harmattan, “Logiques sociales. Etudes culturelles”, 15/01/2021, 1 vol. (213 p.), 23€

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